Chronique de l’échec.

Au Cégep, je n’ai eu qu’un seul échec inscrit à mon bulletin: golf. Quelle idée de choisir ce sport comme cours d’éducation physique…

59%, c’est la note que mon professeur a jugé bon de me remettre.

J’avoue que lors de mon examen, je n’ai réussi à frapper qu’une seule balle, qui s’est malheureusement projetée dans le sens inverse du trajet demandé, pour aller s’échouer à vive allure sur la cuisse gauche d’un étudiant en industrie forestière.

59%, c’est pour ta participation en classe.

À un point de la note de passage, je doute que tu veuilles réellement me féliciter pour mon enthousiasme débordant à frapper (ou tenter de) des balles avec un fer 8. Tu ne veux que souligner à grand trait ma facilité à imiter le look de Tiger Woods sans toutefois avoir une once de son talent sur le green.

De toute façon, il a depuis été prouvé que Tiger Woods n’est pas un exemple à suivre si l’engagement et la fidélité sont des valeurs essentielles à tes yeux.

Bref, la maigre note de 59% est restée inscrite dans mon dossier, comme une belle tache d’encre en plein milieu de mon futur rempli de promesse.

Un échec, ça arrive. C’est plate, mais il faut apprendre à vivre avec. Il clôt un chapitre de notre vie, parfois de façon abrupte, sans préavis clair ni réels signes avant-coureurs. Le point positif? Ça fait de bonnes histoires à raconter une fois la déception passée.

Entre deux réflexions sur la tangente que semble vouloir prendre ma vie depuis quelques mois, je me suis permis un répit tendresse qui m’a conduit au cinéma voir Inside Llewyn Davis, le dernier film du tandem Joel & Ethan Coen, un poème hivernal dédié à la bohème musicale de Greenwich Village en 1961.

Llewyn Davis est un musicien folk sans domicile fixe et au compte en banque inexistant. Dormant de canapé en canapé chez des amis légèrement plus fortunés, il se remet difficilement du suicide de son ami avec qui il formait un duo musical. Œuvrant maintenant en solo, l’homme a un incroyable talent, une voix superbe, un charisme, une prestance, mais ne semble pas avoir de chance…

Enfin, tout ce qu’il touche se transforme en occasion ratée. Il met enceinte la blonde de son ami, il est floué dans ses droits d’auteur et n’obtient pas de redevances sur une chanson populaire, il ne parvient pas à impressionner un important gérant… Ne lui reste que ce petit chat caramel qui lui colle aux pieds, deux âmes perdues qui se sont trouvées.

Ce Llewyn Davis est un magnifique loser, mais également un farouche indépendant d’esprit. Llewyn représente l’homme sacrifié, celui qui va donner son âme à sa musique, défoncer les portes, mais également refuser les opportunités au nom d’une intégrité artistique… La liberté surpasse-t-elle réellement l’argent?

Inside Llewyn Davis est une œuvre mélancolique, une chronique de l’échec qui s’avère être un des meilleurs films de l’année. Comme quoi, il y a toujours espoir de voir jaillir une fleur au milieu d’un tas de marde.

Quelle est votre émotion :